[Quête solo] Disparition lucinienne [Terminé]

Fulenn était absorbée dans son entraînement quotidien, bondissant à la manière d’un félin d’un toit à l’autre de Tenamas. Son itinéraire, que la brune avait pris soin, comme à son habitude, de tracer avant de le parcourir, allait d’une venelle sombre des quartiers pauvres à la Forteresse de Tenamas. La cité obscure dont les frontières et rues étaient autrefois floues pour la jeune femme étaient à présent familières. Elle était attachée à la ville, à la misère boueuse de ses quartiers pauvres, aux visages guindés et hautains des fortunés, à la pierre grise de la place forte. Autrement dit, elle avait ce matin là prévu de parcourir l’ensemble de Tenamas. Soucieuse de parfaire son agilité et son endurance, la femme se voyait obligée de faire des trajets de plus en plus longs. Fulenn était arrivée au terme de son exercice, la Forteresse se profilant devant elle. La jeune femme trouva l’endroit bien plus agité que d’ordinaire. Elle n’avait pas vu moins de trois messagers, plusieurs aventuriers dissimulés sous une cape qui attirait l’attention plus qu’elle ne l’en détournait, et des dizaines de gens se hâter, faisant des allées venues.

*Qu’est-ce qu’il se trame à l’intérieur ?*

Profitant de l’inattention des gardes, après avoir vérifié plusieurs fois qu’aucun d’eux ne la surprendrait, Fulenn s’élança contre le mur de l’édifice, construit en grosses briques solides destinées à résister à de nombreuses attaques, et qui offrait de ce fait de nombreuses prises fort appréciables. La brune vint donc s’écraser contre la paroi, et accusant le coup, celle-ci se dirigea vers la gauche, de manière à se dissimuler sous le pont levis. En effet, l’assassin avait beau aimer le risque, elle n’était cependant pas inconsciente. Il était évident que rester accrochée à découvert sur un monument aussi bien surveillé, à la vue de tous, relevait du suicide. Il lui fallait donc se mettre à l’abri, chose qu’elle fit. Une fois cachée dans sa planque, Fulenn tendit l’oreille. Les gars de la milice étaient en pleine discussion. Il n’était pas facile d’entendre correctement la teneur de leur récit à travers l’épais bois du pont, et la brune n’en percevait que des bribes.

-La fille du roi… Lucina… enlevée par des brigands.

-Notre bon roi… Ici à Umbra… Conspiration… Il veut la peau de la gamine…

- Il faut ramener une preuve…Récompense.

C’est le dernier mot qui avait interpellé Fulenn. D’après ce qu’elle avait compris, la fille du roi de Lucina aurait été enlevée par des brigandes. Le roi d’Umbra aurait quant à lui proposé une récompense, officieusement, à celui-qui tuerait la demoiselle. Les complots à l’échelle des monarques n’intéressaient absolument pas la belle, mais au vu de leur titre et de leur fortune, la rétribution offerte devait être non négligeable… Immédiatement emballée pour l’idée, constamment à la recherche d’aventures pour mettre à l’épreuve ses récentes compétences d’assassin, la femme vit en cela un nouveau divertissement. Bien sûr, elle ne savait pas dans quoi elle s’engageait, et la tâche ne serait pas aisée. Mais quitte à perdre la vie, autant le faire de manière élogieuse. Fulenn remonta un peu plus haut et passa la tête par dessus le bord du pont afin d’écouter le discours et de savoir avec plus de précision le lieu de détention de la princesse.

*Grotte aux ossements… Je note. C’est dans les montagnes glacées ça non ? Bon, finalement, ça va peut-être pas être une partie de plaisir…*

La femme se montrait à présent réticente. Pourtant, le doux bruits des pièces d’or retentit à son oreille et elle soupira avec délectation. Elle fut tirée de son petit fantasme par le cri alarmé du garde qui venait de faire tomber de la monnaie de sa bourse. Ainsi le son de l’or n’avait pas résonné que dans son esprit ?! Voilà qui était… ennuyeux. Fulenn ne pourrait faire face à autant d’assaillants, la Forteresse regorgeant d’autres bretteurs qualifiés, et si elle n’évitait pas l’affrontement, celle-ci n’aurait jamais le loisir de partir à la recherche de la fille du roi lucinien. Elle redescendit donc contre le mur de pierre et se propulsa de l’autre côté de la berge, passant au dessus des douves qui lui faisaient pourtant les yeux doux. La brune prit ses jambes à son cou et se dirigea vers les quartiers riches, en utilisant son moyen de déplacement de prédilection : les toits. Elle arriva bientôt chez un tailleur à qui elle acheta des peaux pour affronter la température peu élevée de sa destination. Enfin… elle ne lui acheta pas vraiment puisqu’elle finit par lui voler le contenu de sa caisse tandis qu’il cherchait un article dans l’arrière boutique. La brune s’en alla l’air de rien, en souriant au vendeur, trop heureux de s’être débarrassé de vêtements que les clients jugeaient généralement trop chers pour en faire l’acquisition.

*C’est presque trop facile !*

Fulenn avait mis peu de temps à traverser Umbra, ayant l’habitude de sillonner la région. Elle ne rencontra aucun problème et commença à s’inquiéter. Le fait qu’elle soit tracassée par le fait que tout aille pour le mieux peut paraître assez cocasse, mais lorsque l’on y réfléchit, non. La femme venait d’entreprendre une mission relativement risquée, seule pour s’opposer à une bande de brigands. Elle avait à traverser tout un monde pour arriver dans un lieu qu’elle ne connaissait pas énormément. Il lui arriverait forcément des soucis, il était impossible qu’elle sorte d’une telle entreprise sans aucun dégât. Cependant, il ne lui était rien arrivé. C’était surprenant et la brune redoubla d’attention.
Voyant la nuit tomber, cette-dernière s’arrêta à la lisière de la jungle des anciens où elle se recroquevilla autour d’un feu qu’elle avait allumé. D’ailleurs, elle avait eu bien du mal à le faire prendre. La jeune femme ne prit pas le soin de se couvrir d’une toile ou de ses peaux, le temps étant clément ce soir-là.

*Espérons que le voyage se déroule comme aujourd’hui. Et que je n’arrive pas trop tard pour la gosse.*

Ce fut la pensée qui l’emporta dans un sommeil paisible. Malheureusement, son repos ne dura pas. Fulenn ouvrit subitement les yeux, alertée par un bruit inconnu. Celle-ci se releva et observa la verdure autour d’elle. Des bruits de sabots, comme un groupe de chevaux semblaient se rapprocher.

*Pour ce qui est du calme, je crois que c’est raté. Ça doit être des galopins. Je ne vois pas quelle créature peut être assez stupide pour attaquer quelqu’un en pleine nuit. Et puis, qu’est-ce qu’ils veulent ?! Ahh, fais chier.*

Le vacarme fut de plus en plus bruyant, et serai bientôt assourdissant. La jeune femme se hâta d’éteindre le feu, imaginant que c’est ce qui attirait les bêtes. Elle n’avait jamais combattu ce genre de monstre par le passé, mais en avait déjà rencontré, aussi le son que provoquait leur course n’était pas inconnu à la voleuse. Il faudrait improviser.
Ils arrivèrent enfin, et stoppèrent net leur cavalcade. Ils étaient donc bien là pour Fulenn. Les galopins se présentaient au nombre de dix. Si la jeune femme s’organisait bien, elle devrait être capable de s’en sortir. Elle se jeta "à califourchon" sur l’un d’eux, et le serra entre ses jambes, tout en sortant une de ses dagues de ses bottes. Se concentrant sur les flux magiques qui s’évadaient d'un peu partout dans le sol et les arbres, la brune invoqua son pouvoir de destruction et commença à aspirer la vie de l’ennemi dont elle écrasait les côtes contre ses tibias. Tout en manœuvrant son pouvoir, celle-ci planta son arme dans le flanc des bestioles qui l’attaquaient à droite et à gauche. La "monture" de Fulenn s’écrasa au sol, vidée de son énergie. Les créatures étaient faibles et désordonnées. Il n’était pas difficile de les battre à condition de ne pas se laisser dépasser par leur nombre.

*Ils auraient pu me réveiller un peu plus gentiment. Je m’attendais pas à ce qu’on me serve des mots doux pour le petit déj, mais là ils font fort. Crevures !*

Le brune esquiva un galopin qui se ruait tête baissée sur elle et celui-ci vint s’échouer contre un arbre sur lequel il s’assomma de lui même. La scène fit rire Fulenn qui perdit sa concentration pendant un instant, court laps de temps que les assaillants utilisèrent pour appeler des renforts. L’intéressée n’en était pas consciente, mais c’est lorsqu’elle vit charger un nouveau groupe de ces bêtes qu’elle comprit l’erreur qu’elle venait de faire. C’était rageant ! L’assassin pouvait les battre, à n’en pas douter, mais leur nombre rendait la bataille impossible. De plus, elle devait se baisser pour les tuer, et son dos souffrait déjà de sa grossesse. Elle fatiguait vite. La fuite était lâche, mais inévitable. Fulenn se hissa sur la cime d’un arbre. Les assaillants se figèrent, interloqués. Ils semblaient chercher leur victime, incapable de réaliser qu’elle s’était mise à l’abri. La jambe de la jeune femme était douloureuse, et celle-ci la massa en grimaçant. Les galopins attendirent encore, imperturbables. Ils attendirent bien des heures…avant de s’énerver.

*Ils me fatiguent ceux-là, pourquoi est-ce qu’ils ne s’en vont pas ?!*

En guise de réponse à l’interrogation silencieuse de Fulenn, deux nouveaux groupes de galopins affluèrent. Mais d’où venaient-ils ? Comment cela était-il possible ? Bientôt, les créatures se mirent à foncer droit dans son arbre avec la ferme intention de le déraciner. Par chance, leur taille ridicule rendait la tâche plus complexe, et la brune ne s’inquiéta pas outre mesure. Celle-ci scruta l’horizon à la recherche d’une idée pour s’échapper. C’est là qu’elle vit arriver deux monstres massifs, et ceux-ci étaient bien plus impressionnants que les petits galopins qui s’escrimaient à faire de la purée de l’abri de Fulenn. Ils déplaçaient leur lourde carcasse de pierre avec une lenteur extrême, allure qui permit à la voleuse de réfléchir. Elle n’arriverait jamais à bout de ces mastodontes à l’aide de ses armes, c’était inéluctable. La magie semblait, quant à elle, aussi inutilisable que les dagues de la jeune femme. Pour cela, il aurait fallu qu’elle touche les amas de gravats vivants, et elle finirait sans doute écrabouillée avant d’y être parvenue.

-Ciao les cocos !

Il était temps que les efforts de Fulenn payent. Ses régulières courses sur les toits et exercices d’escalade allaient enfin servir à quelque-chose. L’intéressée se jeta sur un arbre non loin de là, glissant comme une ombre vers celui-ci. Elle s’agrippa à une branche et continua, quand elle aperçut que les galopins la suivaient. Elle resta donc immobile, caché dans le feuillage, inquiète. Bientôt, les êtres de pierres furent au niveau de Fulenn et de ses compagnons d’infortune. Celle-ci ne comprit pas très clairement ce qu’il se passa, le résultat demeuraient cependant clairs : les pierres mouvantes avaient écrasé les petits monstres, y voyant peut-être un ennemi. La brune coupa quant à elle sa respiration, toujours dissimulée sous le couvert d’un orme. Ils s’en allèrent, l’air de rien, satisfaits d’avoir décimé la population galopante.

*On appelle ça de la chance ? Ouais.*

La jeune femme put enfin reprendre sa respiration et terminer sa nuit, qu’elle ne se risqua pas à passer à terre.
Lorsque l’aube pointa, Fulenn était courbaturée, bien décidée à ne plus s'assoupir dans un arbre. Ce n’est pas que c’était inconfortable à mourir mais… c’était un peu dur quand même. Et puis l’écorce ça laissait des traces sur le front. La traversée du reste de la jungle n’étant pas des plus palpitantes, les moustiques ayant l’air d’affectionner tout particulièrement le bras gauche de la brune, je préfère passer sous silence ces évènements – Comment ça ? Le donjon de Naheulbeuk ?! connais pas.- Nous arrivons donc à la vallée des mégalithes, où Fulenn vient d’exterminer une plante carnivore sans difficulté. C’est tout en essuyant sa lame, sifflotant d’allégresse, que l’aventurière avançait sur ce terrain plat qu’était la vallée. Soudain, le paysage se mit à trembler. Surprise, Fulenn haussa un sourcil et cessa d’avancer.

*Qu’est-ce qu’il se passe ?*

Fulenn fit un pas en avant… et tomba dans un précipice. S’agrippant à la paroi, quelque-chose tira la jeune femme. Celle-ci se débattit, lorsqu’une silhouette qu’elle connaissait par cœur apparut. Elle l’avait vu des milliers de fois. Tous les jours depuis le moment où elle était née jusqu’au jour où elle avait pris la fuite. Il avait quelque-peu vieilli, mais il demeurait reconnaissable : son père. Cet elfe noir cruel qui avait abusé d’elle, l’avait battue, lui avait fait faire l’objet d’expériences terribles. Ce vil personnage qui lui avait volé son enfance et ruiné son avenir. Il était là, à portée d’arme. Il ne suffisait à Fulenn que de tendre sa dague pour le transpercer. Mais que faisait-il là ? La brune regarda autour d’elle, et se rappela qu’elle venait de tomber dans un trou. Se pouvait-il que… Avait-il tout manigancé ? Les gardes, l'histoire de princesse prisonnière, tout ça n'était-il qu'un mauvais tour joué par le père de Fulenn pour la récupérer ?

-Tu vas payer pour ce que tu m’as fait ! Arrrrrrrgh !

Prise de folie, Fulenn se jeta vers sa cible. Incapable de se raisonner, celle-ci moulinait dans l’air, tournoyant telle une furie contre une chose qu’elle était la seule à voir. Non loin de là, un ombre riait de sa manœuvre. La brune se dirigeait dangereusement vers un mégalithe qu’elle heurterait bientôt. L’immobilité de son père eut tôt fait d'inquiéter la belle. Son géniteur, un bretteur hors pair, n’était certainement pas du genre à se laisser tuer sans réagir. Même en puisant dans l’esprit de Fulenn, c’était un détail qu’avait omis la créature maléfique qui se jouait de la femme. Celle-ci eut un éclair de bon sens.

*Mais…j’étais dans une vallée. Il n’y a pas de trous dans une vallée ! Je… Un ombre. Ce doit être un ombre.*

Fulenn n’avait jamais voulu croire les propos des aventuriers un peu ivres qui racontaient leurs périples dans la petite taverne que fréquentait cette dernière. Ils avaient déjà parlé de ces rois de l’illusion qui puisait directement dans la mémoire pour trouver l’élément à utiliser contre leur victime. Cependant, il était difficile de croire un homme qui venait de s’enfiler une dizaine de litres de bière, surtout s’il était plutôt gringalets. Il fallait s’attaquer à eux pour les défaire, ayant une constitution minable. Afin de perturber son ennemi pour sortir de ses illusions un instant, Fulenn s’attaqua elle-même. Posant la main sur son épaule, elle se mit à absorber sa vie, peu à peu. Son manège eut l’effet escompté, l'ombre ne comprit plus ce qu'il se passait, son plan ne se déroulant pas correctement. Fulenn continua, et bien qu’elle se sente incroyablement faible, les images pipées qu’elle voyait s’arrêtèrent pour la faire revenir à la réalité. Elle aperçut sa cible à quelques pas et courut vers lui. Elle le transperça de plusieurs coups de dagues, extériorisant toute la haine qu’elle avait voulu déchaîner sur son père un instant auparavant. Quand elle fut certaine qu’il fut trépassé, cette-dernière s’évanouit, épuisée.

Lorsqu’elle reprit connaissance, le cadavre de l’ombre avait disparu, mais la brune se trouvait toujours dans la vallée des mégalithes. Elle reprit donc sa route après avoir mangé un morceau de pain qu’elle transportait avec elle. Fulenn contourna Equilios pour rejoindre directement les montagnes de Glaces, son objectif actuel. Elle y arriva à la tombée de la nuit, ce qui la sidéra. Elle avait traversé deux mondes en deux jours. Son entraînement faisait visiblement de l’effet, chose qui la revigora.

*C’est fou. Je n’en reviens pas. Tout se compliquera demain, je dois me reposer.*

Fulenn entama l’ascension de la montagne à l’aube. Le froid était glacial, mais les peaux achetées à Tenamas protégeaient cette-dernière sans pour autant l’empêcher de grimper. La varappe était corsée par la glace qui rendait les prises glissantes et dangereuses. Pourtant la brune résistait et continuait, concentrée. Après une demi-journée d’errance à travers le mont, celle-ci trouva enfin l’entrée de la grotte aux ossements. Elle était gardée par deux brigands, chose qui n’était pas vraiment judicieuse, puisque c’est ce qui avait permis à la demi-elfe de trouver l’entrée de la caverne.
L’heure était à présent à l’élaboration d’un plan. Mais pour cela, il fallait s’approcher, pour estimer le nombre des ennemis. Fulenn contourna donc l’issue et s’agrippa à la paroi qui s’engouffrait à l’intérieur. Bien sûr, l'escalade se faisait à l’horizontale, puisque la jeune femme était à présent plaquée au plafond de la grotte. Il en fallait plus pour l’impressionner, et celle-ci ne perdit pas son calme. Elle observa les truands, leur organisation et leurs armes.

Ceux-ci étaient une petite dizaine, armés de dagues assez semblables à celle que possédait la voleuse, quoiqu’en moins bon état, signe qu’elles avaient sûrement plus servi. La prisonnière était au fond de la grotte, enchaînée de façon grotesque, et même pas bâillonnée. Certains semblaient rire de ses hurlements de terreur. On ne pouvait pas se tromper quand à l’identité de la détenue : elle portait des vêtements luxueux, et sa couronne était tombée au sol. Et puis, c’était aussi la seule femme. Les brigands mangeaient, détendus et regroupés en cercle. Fulenn retourna à l’entrée de la grotte.

– Hey les gars, on tourne !

Le signal avait été lancé. Ils changeaient de tour de garde. C’était le moment où jamais pour l’aventurière de se camper près de leur poste et d’attendre pour les surprendre et les tuer. Les autres ne se douteraient de rien et enverraient de nouveaux gardes qu’elle tuerait une fois de plus. Cela ferait 4 gardes en moins, et leur nombre se limiterait à 6.
Fulenn se serra si fort contre le pan de la montagne qu’elle avait l’impression de ne faire qu’un avec celle-ci. Lorsque le premier surveillant sortit de l’ouverture, la femme planta sa dague dans le cou du truand en lui obstruant la bouche afin qu’il ne crie pas. Elle réitéra l’expérience avec la seconde tournée de veilleurs et sa stratégie se déroula comme elle l’avait pensé. Elle n’avait que quelques minutes de battements avant que les brigands ne s’aperçoivent que les gardes ne revenaient pas. La brune en profita pour enfiler les habits d’un des leurs et entra l’air de rien dans la grotte. Bien sûr, son subterfuge ne dura pas. Il lui permit cependant d’éliminer deux concurrents à qui elle trancha la gorge tout simplement. Il ne restait plus que 4 hommes en lice. Les combattants n’étaient pas chevronnés et Fulenn eut vite fait de tuer encore deux d’entre eux. Elle se retrouva face à face avec un bandit plus robuste et vêtu moins modestement que ses défunts camarades. Ce devait être le chef. Une mise à mort s’entama. Les duellistes se jaugeait, essayant d’élaborer une technique et de comprendre la stratégie de l’autre.

*Il a l’air très musclé. Je vais devoir la jouer finement si je compte m’en sortir. Déjà, il va falloir se battre défensif.*

Comme la brune se l’imaginait, la brute se lança sur elle, un rictus carnassier sur le visage. On aurait dit un taureau. Celui-ci chargeait, jouant des lames comme de ses cornes. Au contraire de ses camarades et à l’instar de Fulenn, le chef était ambidextre. Un vrai combattant, mais qui semblait au demeurant posséder peu de cervelle. Respectant sa tactique, la belle attendit qu’il charge, et à chaque fois que l’occasion se présentait, celle-ci donnait un coup à son adversaire. Usant tantôt de ses mains, tantôt de ses pieds ou encore de sa dague, cette-dernière se montrait patiente. La brute s’épuisait, mais elle changea bientôt de parade. Ses petits coups saccadés cédèrent la place à une offensive de fond. L’ennemi harcela la femme, l’obligeant à reculer de plus en plus vers la paroi de la grotte. Le bras de la demi-elfe fut touché et le sang s’en répandit un peu partout. La brune suffoquait. Voyant l’espace entre elle et le mur diminuer, celle-ci trembla. Elle devait restée concentrée, sinon, c’était foutu ! Et surtout, il ne fallait pas montrer à son assaillant qu’elle faiblissait.

*Je vais attendre le dernier moment. Plus que quelques pas, plus grand chose…*

Alors que le chef de la bande s’apprêtait à lui saisir l’épaule pour trancher la gorge de Fulenn, celle-ci se déroba de l’étreinte de l’homme et se plaça derrière lui, rapide comme l’éclair. Elle donna un violent coup de pied dans le séant de celui-ci qui vint s’échouer contre le mur. La femme ne voulait pas lui laisser le temps de se retourner, elle fonça donc sur l'intéressé, lui déchirant le dos avec son arme. Le pauvre homme s’écroula. C’était une vraie boucherie.

La brune hurla à la victoire. Celle-ci s’appropria l’épée, abimée mais de qualité, du chef de la bande de brigands. Elle irait la faire porter au forgeron, ça coûtait toujours moins cher que d’en acheter une neuve. Elle était soulagée d’avoir terminé sa quête et de pouvoir rentrer chez elle où l’attendait une récompense. Cette-dernière se frotta même les mains d’impatience, ce qui relança la douleur de son bras. L’entaille était profonde, et la jeune femme devrait sans doute s’arrêter à Equilios pour se faire soigner… A moins que les brigands ne possèdent sur eux un matériel de soin, ce qui aurait tout de même était un coup de chance énorme. La demi-elfe noire prit le soin de fouiller les poches de ses victimes, juste au cas où. Elle y récolta une vingtaine de pièces d’or et quelques gourdes remplies de vin. La jeune femme en but une rasade pour se remettre de son combat. Elle s’assit un instant et versa le reste de l’outre sur sa blessure, afin de désinfecter la plaie.

*Paraît que ça nettoie les coupures de mettre de l’alcool dessus. J’en sais rien moi, mais ça arrache en tout cas !*

La belle brune se remettait tranquillement de son épopée, oubliant même la prisonnière au fond de la caverne. D’ailleurs, la détenue… Elle avait disparu ?! Paniquée, Fulenn se redressa très rapidement, scrutant l’antre. A droite, rien. A gauche, rien. Mais… Que s’était-il passé ? Forcément, dans ce genre d’aventure, il y avait toujours un truc qui foirait. Tout en grommelant, la femme se remémora l’infiltration dans la caverne aux ossements. Elle avait tout d’abord assassiné les deux hommes qui montaient la garde, puis leur relève, une demi-heure plus tard. Il ne restait à ce moment que six bandits sur dix. Elle était alors entré dans leur repaire, habillée en l’une des leurs, où elle avait tué deux d’entre eux par surprise. Quatre bandits étaient encore en vie alors. Elle s’était battu avec deux misérables qui étaient bien piètre combattants, pour enfin ôter la vie au chef. C’était donc ça ! Fulenn jura tout haut, et il n’est pas essentiel de retranscrire son discours ici, celui-ci n’étant pas des plus… poétiques.

*Yen a donc un qui s’est fait la malle. Merde !*

-Et oh, mon gars. Le roi d’Umbra promet une belle somme à quiconque ramènera la princesse. Ce que je te propose, c’est que tu coopères, tu montres le bout de ton nez, et moi, j'te file la moitié du pactole. Ça te convient ? Je suis sympa quand même… Allez montre toi !

Malheureusement pour elles, les propos ne s’adressaient pas aux chauves souris qui comataient non loin de là. Pourtant, ce devait être les seules à qui profitait le discours, le dernier bandit s’étant échappé au dehors de la caverne. Fulenn mit très peu de temps à le comprendre et se précipita vers la sortie après avoir remis son armure. Il fallait descendre de la montagne car il serait plus facile de capturer le truand et la princesse en bas de celle-ci. De plus, la femme se doutait qu’ils ne resteraient pas éternellement dans un endroit au climat si peu vivable. La brune fut donc rapidement en bas, habituée à l’escalade et à toute sorte de pirouettes acrobatiques. Les fuyards avaient trente minutes, mais ceux-ci étaient désavantagés par la forme physique de la fille du roi de Lucina, car elle était, comme toutes les princesses, habituée aux transports de luxe comme les carrosses ou les porteurs. Ses pieds étaient donc délicats, et son souffle court.

Ils n’étaient que deux points à l’horizon, s’échappant comme ils le pouvaient. C’était gagné s’avance. Ils ne connaissaient pas le chemin, Fulenn, oui. Celle-ci se mit à courir aussi vite qu’elle put. Au bout de quelques heures, la demi-elfe avait rattrapé son retard, et elle se retrouva, exténuée, en tête à tête avec le truand. Là, sournoisement, elle réitéra sa précédente proposition :

-Et oh, mon gars. Le roi d’Umbra promet une belle somme à quiconque ramènera la princesse. Ce que je te propose, c’est que tu coopères et moi, j'te file la moitié du pactole. Ça te convient ? Je suis sympa quand même… Je pourrais aussi te tuer.

L’inconnu hésita un instant, et acquiesça silencieusement. Continuant sur sa lancée, la femme ajouta encore :

–Hey ! J’ai l’habitude de traiter avec des énergumènes de ton espèce. Je veux que tu me serres la main, sinon, j’ai pas confiance.

Le bandit s’exécuta, et ce fut sa dernière action. La brune avait profité de ce contact pour aspirer la vie de l’homme. Horrifiée, tremblante, la princesse observait cette surprenante demi-elfe qui l’avait secouru des brigands. Cependant, elle demeura silencieuse, intimidée. Fulenn hésitait encore.. Peut-être que le père de cette fille promettait une récompense lui aussi.. La vie de la fille lui appartenait, et la brune décida de s’amuser un peu. Elle dit à son interlocutrice :

- Dis moi un mot, et si celui-ci me plaît, je t’épargne.

Levant des yeux suppliants sur sa nouvelle détentrice, la fille du roi répondit sur un ton de prière :

-Pitié !…

-J’aime pas les chochottes.

La mine de lapin pris au piège de la fillette s’éteignit en même temps que sa vie. Sans aucun scrupule, Fulenn s’empara de ses joailleries et les passa sur elle. Elle prit ensuite ses vêtements et les fourra dans son sac. Tout aussi cruellement, la brune empala la tête de sa victime sur l’arme du chef bandit, doutant qu’il existe une preuve plus convaincante de la réussite de la quête. Après avoir mis le feu au corps, l’assassin s’en alla la tête haute. Elle s’arrêta à Equilios où elle paya un guérisseur avec l’argent récolté sur les cadavres de truands. Cette-dernière n’eut plus aucune douleur au bras par la suite et remercia profondément le médecin. Jugeant qu’il était trop tard pour reprendre la route, la femme dormit dans une auberge crasseuse qu’elle paya de sa propre bourse. De toute façon, se disait-elle pour se consoler, l’argent que va me filer le roi va rembourser tout ça. Le voyage de retour se fit sans encombre, le troupeau de salesko rencontré ayant décidé de ne pas attaquer Fulenn, et ce à sa plus grande joie. La femme n’eut pas le courage de dormir une nouvelle fois dans la jungle des anciens, redoutant bien trop de croiser à nouveau ses agresseurs de l’allée. C’est donc après avoir passé une nuit blanche, au matin du lendemain que la brune passa les portes de Tenamas. Elle brandit tout haut son trophée dans les ruelles sombres de la cité, ignorant avec brio les mimiques dégoutées et les malédictions que lui lançaient certains habitants. Contrairement à son approche du début du récit, Fulenn n’essaya pas d’entrer furtivement dans la Forteresse. Elle se présenta comme la grande gagnante de la quête commanditée par le roi. Les gardes firent comme si de rien n’était :

[color=blue]-Je ne vois pas de quoi tu parles. Tu vas aller pourrir au fond des cachots ! Voilà ce qu’il va t’arriver !

Son collègue essaya d'attraper le trophée de Fulenn, la menaçant de sa lance. Après quoi il surenchérit, tout aussi menteur que l’autre :

-Tu es une malfrat. Donne nous ça, et on va te régler ton compte.

*Je les vois venir. Eux aussi veulent s’approprier la rétribution du monarque. Mais je ne vais pas me laisser faire ! Ils veulent jouer au plus malin ?! Je sais y faire, moi aussi.*

Se faisant douce et affectueuse, l’ancienne fille de joie se mit à parcourir les bras des gars de la milice et doucement, elle leur chuchota :

-Les garçons, les garçons… on ne va pas se fâcher. Conduisez moi à notre souverain, et je dirai que vous m’avez aidé. C’est d’accord ? Vous et moi savons très bien que la somme est assez importante pour trois…

Les deux compères se consultèrent du regard et cessèrent de tenter de s’approprier la tête de la princesse. L’un d’eux était perdu quelque-part dans le corset de Fulenn, ses yeux au moins, et l’autre regardait le ciel comme pour obtenir une réponse à un questionnement silencieux. Il avait l’air de lui demander : « est-ce qu’on peut faire confiance à cette fille ? » La chance sourit à la demi-elfe puisque le premier garde, celui qui avait l’air le moins crétin des deux, s’élança en faisant signe de le suivre à l’aventurière. Celle-ci ne se fit pas prier. Elle égorgea son guide au détour d'un couloir, prenant celui-ci par surprise. Hélant une servante pour qu'elle l'oriente un peu, Fulenn fut bientôt présentée devant le roi, dont le visage était dissimulé sous une capuche. Il n’était pas étonnant que le souverain d’un royaume si sombre garde un voile de mystère… Sans prendre la peine de se plier à la politesse, refusant de s’incliner ou même d’utiliser un ton condescendant, Fulenn clama :

-Voici la preuve que j’ai tué la fille. Et les brigands qui la tenaient prisonnière.

La brune leva bien haut l’épée de la brute de chef des bandits, et attendit patiemment qu’on lui fasse signe.

Fulenn Gwal --> 30xp

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