Un duel pour l'amitié [Pv Michaëlis][Terminé]

Le majordome fut réveillé par un hurlement de mécontentement. Le maître de maison était rentré en trombe dans sa petite chambre. Son maître le sermonna pendant plus d’une demi-heure, lui disant que cela était dégradant pour sa propre famille de trouver son majordome ivre mort devant sa porte en train de rigoler sans vergogne pour des raisons qui lui étaient inconnue, et de proférer des paroles blessantes envers lui-même et sa femme.


Ceci étant dit, il lui ordonna de se changer et d’aller faire quelques courses pour lui. Le majordome comprenant tout à fait la réaction de celui-ci s’excusa un genou à terre puis s’exécuta, enfilant son costume habituel et son long manteau n’oubliant pas ses gants immaculés. Il se regarda une dernière fois dans un des miroirs du manoir puis sortit.


Le temps était maussade, les nuages dominaient le ciel,la pluie s’annonçait. Michaëlis se remémorait les paroles de son maître et avait toujours du mal à croire qu’il avait put rentrer saoul au manoir et dire des paroles insensées au maître de maison. Il se débarrassa de ces pensées assez déplaisantes et se dirigea vers le marché.


Comme d’habitude, il grouillait de monde. Les marchands tentaient de convaincre les passants d’acheter leurs articles. Ou encore certains poursuivaient littéralement les clients qui étaient passé à leur stand mais qui n’avait rien acheté et encore d’autres hurlaient que leur prix était les meilleures et les plus abordables.


Michaëlis s’arrêta chez un marchand de légumes et en acheta quelques uns, ce marchand avait en général des produits de très bonnes qualités et satisfaisait tout ses clients d’ailleurs il en avait en masse. Il devait très bien gagner sa vie en tant que commerçant. Puis le majordome alla chez un marchant de fruits, choisissant les pommes les plus belles et les fraises les plus rouges. Il prit une pomme bien rouge pour lui-même, la mangeant tout en marchant vers d’autres étalages…

Il suivit Fléau sans un mot. Il voyait bien que celui-ci n’était pas de bonne humeur.

Ils allèrent dans une auberge et s’assirent et commandèrent chacun un repas. Il essaya de lancer une conversation, mais sans résultat, soit Fléau acquiesçait tout simplement, soit il ne répondait pas. Aucun d’entre eux ne mangea.
Alors le majordome s’intéressa à l’auberge elle-même.


Elle était simple, mais très esthétique . Les couleurs étaient vives et chaleureuse, du rouge, du jaune et un peu de marron. Le sol était un parquet rustique, usé par le temps et par les gens qui y marchaient à longueur de temps. Les serveuses et serveurs étaient bien habillés, on voyait par cela que cette auberge avait une certaine classe. Le directeur était un vieil homme, à peu près la soixantaine, les cheveux grisonnants et de petite taille. Il était fort sympathique et venait souvent en salle pour saluer quelques clients qu’il ne connaissait que trop bien.

*Je me demande bien ce qui peu mettre Fléau dans cet état* se demanda Michaëlis.


Il lui proposa de sortir pour prendre l’air, car il n’avait pas l’air très en forme. Lui qui d’habitude, buvait abondamment sans jamais perdre sa lucidité ou encore discutait de ses dernières missions et de l’argent qu’il y avait gagné. La il ne disait rien, il regardait dans le vide et parfois jetait des coups d’œil au majordome, comme si il allait lui dire quelque chose mais qu’il se ravisait. Et Michaëlis trouvait tout cela assez bizarre et préféra être sur ses gardes au cas ou ils leur arriverai malheur, ou feraient une mauvaise rencontre.

Michaëlis déposa de l’argent pour leur consommation sur la table, puis attendit Fléau…

Michaëlis ne comprit pas de suite ce qui se passait, il vit juste la faux de Fléau près à le déchiqueter. Il ne croyait pas trop en cette histoire de «　défi　». Un coup de poing magistral l’attint dans les côtes, il en perdit son équilibre et son souffle, sentant le gout du sang envahir sa bouche.

Il se leva avec beaucoup de mal, et sortit ses deux lames. Il avait conscience de la différence de force qu’il y avait entre lui et Fléau, mais il tenta de la compenser avec son agilité et sa vitesse, esquivant les coups difficilement sentant ses côtes craquer à chaque mouvement.


Il grimpa sur un arbre pour reprendre son souffle, seulement Fléau avait l’air décidé et ne lui laissait pas une seconde de répit, reprenant ses attaques avec plus de forces, sans retenue. C’est vraiment à ce moment que Michaëlis réalisa qu’il voulait réellement le tuer. Il n’en voyait pas la raison, mais il ne comptait pas se laisser abattre.


Il descendit de l’arbre puis couru vers son adversaire brandissant une de ses lames devant lui, il esquiva un coup de faux, et atteint l’armure du bras gauche de son ennemi. Il essaya de mettre un peu plus de force dans chaque coup qui lui portait, seulement, l’armure protégeait toujours Fléau et Michaëlis commençait à être à bout de souffle, sentant la douleur grandir à mesure qu’il se déplaçait, il sentait sa vitesse diminuer, alors il se contenta de son agilité qui elle-même commençait à laisser à désirer.

Le couple qui précédemment avait quitté le parc revint, et vit outré l’état du majordome. Ils se précipitèrent vers lui, l’homme ramassa Michaëlis et le mit sur son dos. Ils l’emmenèrent dans une auberge non loin et le soignèrent dans une des chambres, prenant soin de ne pas le réveiller.


La femme qui s’y trouvait était par chance un médecin et sut quoi faire. Elle désinfecta les plaies et mit des bandages là où il le fallait. Elle attendit qu’il se réveille.
Michaëlis ne pouvait toujours pas bouger. Il ouvrit les yeux mais ne sentait plus son corps, il réussissait à peine à parler. Le couple le rassura, puis la jeune femme le prévint que la suite serai assez douloureux. Elle le mit torse nue et fit craquer ses côtes une fois de plus sous des hurlements de douleurs. Elle lui donna une infusion pour faire passer le poison paralysant.


Une fois tout cela fait, elle lui dit qu’elle paierai la note de l’auberge et de se reposer correctement. Elle s’en alla laissant Michaëlis seul. Au bout de quelques heures, il put bouger il s’assit toujours un peu sonné et se rappela du combat entre lui et le démon, il avait été navrant et il se sentait minable, suite aux dernières paroles de Fléau. Il fouilla dans sa poche à mouchoir et y trouva une lettre, visiblement de la part de Fléau.


~J‘ai été faible, mais la vie est faite ainsi, je veux que tu fasses le mort un certain temps.
Nous nous retrouverons à l‘aube demain au même endroit. Fait attention à toi ! Et guérit bien.
Pardonne-moi encore, mais je me suis fait plaisir.
Cordialement,
Fléau.~


Il froissa le papier entre ses doigts, carrément énervé. Il essaya de se relever mais se rassit directement, un miroir devant lui montra sa "nouvelle coupe " il haï Fléau au plus profond de lui-même, sa coiffure était hideuse, elle ne ressemblait à rien et lui faisait ressembler à un gueux, mais il ne s‘y attarda tout de même pas. Toute la soirée, il ne dormi pas, la douleur était encore cinglante mais elle se calmait petit à petit. Il espérait que le lendemain, il ne ressentirait qu’une infime douleur à la jambe et dans son corps…

Il se réveilla difficilement, le corps encore endoloris. Il regarda le petit papier froissé à côté de lui puis se dit que ça n’en valait pas la peine, Fléau l’avait malmené avec violence et sans vergogne, le déchirant de part en part. Il se leva doucement et se regarda encore dans le miroir. Il remédia à cela en quelques minutes. Il les coupa encore plus court puis les mit tous en arrière.


Cela lui allait moyennement mais il s’en contenta. L’aube était passé il avait déjà quelques minutes. Il se fit violence pour marcher, puis essaya d’avoir une démarche convenable.


Il sortit de l’auberge, et acheta sur le chemin de quoi se changer. Il se vêtu d’un nouveau costume, cette fois avec une cravate et marcha difficilement mais toujours avec classe jusqu’au parc. Il ne vit tout d’abord personnes, alors il continua de marcher.


Cette journée était ensoleillé, une brise très légère caressait les feuilles des arbres et les oiseaux chantaient une de leur mélodie enchanteresse et annonciatrice de beau temps. Le lieu du combat de la veille était dévasté, des arbres déraciné, d’autre quasiment tranché en deux, l’herbe portait encore des taches de sang qui n’étaient autres que ceux de Michaëlis, d’ailleurs il revit le moment où Fléau avait failli l’achever, mais au lieu de cela avait préféré le faire souffrir en mettant des orties dans la plaie béante de sa jambe. Il ferma les yeux pour oublier cette scène et trouva un banc encore debout. Il s’y assit et regarda à l’horizon.


Au moment où il avait comprit que Fléau était près à le tuer, il s’était sentit trahi. Mais n’en avait il pas l’habitude ? Il s’était juré de ne plus jamais faire confiance à qui que se soit. Et pourtant n’avait il pas cru en Fléau ? Il maudissait sa bêtise et sa naïveté.


Il avait tenu jusqu’à il y a quelques jours puis avait cédé à la ressemblance qu’il y avait entre Fléau et lui. Il commença à se lever pour s’en aller se demandant pourquoi il était encore là. Mais voyant une grande silhouette s’approcher il se ravisa et l’attendit…
　

Fléau avait changé de vêtements, il avait laissé son armure pour un ensemble plutôt classe. Il voulait faire bonne impression.
Une fois devant le parc, il resta immobile, soucieux de ce qui l’attendait. Plusieurs minutes il repensa à sa vie bien misérable, sans amis, sans famille, nul rêve et pas d’avenir. Il se dit que le majordome lui avait encore tant à vivre, il était jeune et beau, habile et futé. Il enviait son charisme …
Après quelque minutes de réflexion il entra dans le parc en fleur où résonnait le chant des hirondelles et des rossignols. C’était agréable et apaisant.
Chaque pas était plus dure, il avançait vers l’inconnu, un destin qui changerait à jamais son existence, il le ressentait intérieurement mais ne pouvait l’expliquer. Une fois à quelque mètres du points de non retour il se contenta de s’accroupir. Regardant de loin le mutilé qu’il avait pris plaisir, sans raison de le torturer.

L’apercevant s’impatienter, il prit la décision de se montrer, il fit mine d’être fier, mais il n’était qu’un petit oiseau à peine sorti du nid, qui ose difficilement battre des ailes. La tête haute il le salua, jetant des regards bref sur les différentes parcelles du cœur de Michaëlis. Fléau avait laissé Ténébris à la maison, ne souhaitant pas être déranger par le bruit aigu du corbeau.

"Bonjour …" Balbutia-t-il.

Il n’osait pas continuer, si il avait eu la force, il serait parti sans dire un mot, juste un adieux, mais il n’était pas tranquille, il devait se libérer d’un fardeau, celui d’avoir atteins à la vie d’un homme, un bel homme qui aurait pu être son ami. Son compagnon avec qui on passe des moments agréables, des ragots, des rires. Mais rien de tout cela n’arrivera, le démon était un être sans pitié, dominé par la colère et le passé. L’heure de la rédemption devait sonner !

"Je serais franc, le petit jeu doit arrêter, je dois te faire justice. J’ai été payé pour mettre un terme à ta vie. Mais la force ne m’en a pas donné le courage. J’ai préféré jouer avec ta santé. Contre mon grès, ma vie de démon n’est pas toujours facile, et j’aime nuire aux gens que j’aime. Car oui, Michaëlis Kuso, bien que ce sentiment ne doit pas être réciproque, je t’aime !"

Derrière son masque, un visage blême laissait couler quelque larmes, des larmes de colère, contre lui-même, son existence toute entière.
Il sanglota comme un enfant, s’assis avec fracas sur le banc qui se fissura et enleva son masque.
Le visage pâle comme la mort, ridé, vide de sentiments, les yeux plongés dans le noir.
Il ne pouvait plus dire un mot, la gorge sèche, il bougeait ses doigts contre son grès, frappant le sol du plat du pied.

"Il y a des gestes qu’on ne peut pardonner. Des mots qui blesse plus encore que la mort. Des gens qui souffrent, d’autres qui vivent avec le sentiment d’être heureux. Mais tous, nous sommes égaux, dans nos défauts et nos qualités.
Je sais que je suis dans une catégorie de lâche et de mélancoliques. Mais toi, tu es jeune, je ne veux que vengeance, alors allons tuer cet être qui nous a opposé, et après, passons nos chemins, comme deux ombres égarés insouciantes."

Il lui tendit son épaule lui disant de s’appuyer. Il remit son masque, réajusta son long manteau et patienta.

Michaëlis était abasourdit par le discours du démon. En effet, malgré cet affrontement plus que violent, il aurait put refuser le rendez vous mais était tout de même venue. Il n’avait pas put croire que Fléau l’avait attaqué sans raison. Mais en même temps n’était ce pas un démon ? Il avait dut être épuisé par la vie ,qui apparemment ne lui avait pas fait de cadeau. Mais, Michaëlis avait trouvé en ce démon tout ce qu’il voulait d’un ami. Malgré la longue vie de Fléau, ils avaient tout deux certaines ressemblance. Et dès que Michaëlis lui avait parlé, il avait sentit qu’il pouvait lui faire confiance, une confiance aveugle et sans limite.


Entendant les raisons qui avait poussé Fléau à jouer avec sa vie, il se sentit débarrassé d’un poids énorme sur ses épaules. D’ailleurs, il ne refusa pas celle de Fléau, il y appuya sa tête, et toute la souffrance qui déchirait son corps sembla s’apaiser.
Il ferma les yeux et respira un bon coup. Il passa son bras sur l’épaule de Fléau pour tenter lui aussi de le réconforter. Les larmes du démon et sa sincérité l’avaient calmé. lui-même ce laissa aller à quelques sentiments qu’il avait longtemps oublié. La tristesse, le soulagement et la joie de retrouver quelqu’un. Quelqu’un qu’il ne connaissait que très peu, mais sur qui il pouvait compté.


-Je ne suis pas venue ici par hasard, dit il tout bas, je me doutais que tu avais une bonne raison de m’avoir malmené de la sorte. Sache que je ne t’en veux pas. Ce moment restera certes longtemps gravé dans ma mémoire, mais pas seulement comme une bataille, qui était pour moi perdu d’avance, mais aussi comme les retrouvailles d’un monde perdu qui mourrait peu à peu autour de moi, et d’un ami, d’un vrai. Ce sentiment est réciproque et il ne périra pas, peu importe ce qui arrivera…


Une profonde amitié se créait, les paroles du majordome étaient sincères et il ne regrettait pour rien au monde de les avoir dites. Quelques larmes perlèrent sur ses joues, se voulant discrètes. il n’avait même plus la force de les essuyer, mais cela n’avait aucune importance. Le ciel était dégagé, l’aube était passé, mais les oiseaux étaient restés, et semblaient chanter en leur honneur, leur amitié retrouvée.


Le vent dans les feuilles berçait doucement le majordome déjà engourdi par la chaleur de ce jour .Le sommeil le submergeait doucement mais surement et sans s’en rendre compte, il bougea légèrement, son bras glissa lentement dans le dos de Fléau puis il s’endormi sur l’épaule forte et réconfortante de son ami, et pour la première fois depuis longtemps, un sentiment de paix l’envahi…