Pomme caramel et orange chocolat [Terminé]

Douze heures, midi, enfin à peu près. Le soleil, fièrement posté au dessus de Seyta ,rayonnait si fort qu'il semblait faire pression contre son corps. Cependant, malgré la chaleur quasi-suffocante, l'harmonien continuait de marcher, l'air paisible et serein. Même s'il cherchait un petit coin sombre pour y faire la sieste et se protéger de la chaleur qui lui léchait la peau, il se trouvait chanceux d'avoir la chance d'être victime du soleil. Chanceux de sentir le vent qui le consolait, chanceux...de ne pas avoir à se dépêcher. Plus particulièrement de ces temps-ci puisque les temps ensoleillés se faisaient plutôt rares et éphémères. Alors, quand on avait la chance de le voir, il fallait l'accueillir pour pas qu'il parte trop vite.

Ses sens étaient altérés. Sa vision un peu floue. Néanmoins, l'impression de légèreté et de bien-être qui accompagnaient ces quelques désagréments valaient bien le coup. La drogue faisait son effet. Lentement, il recrachait la fumée opaque d'une rouge bourgogne qui, lentement, se dispersait dans l'air sous forme de filaments. Seyta jubilait et euphorisait. C'était un de ces moments magiques qui ne méritaient pas de terminer quelle que soit la raison. Tout était parfait. La tranquillité, la paix, le bonheur, l'absence de soucis (même s'il en a jamais vraiment eu).

Il marchait, sans relâche, laissant ses souliers usés par le temps le transporter toujours un peu plus loin. Son sac qu'il tenait sur son épaule, ses pantalons un peu trop grand pour lui et son semblant de chemise à laquelle il manquait plusieurs boutons étaient toujours fidèles aux postes, comme à tous les jours d'ailleurs. Ses airs de clochards ne le dérangeaient pas, bien au contraire. Il éprouvait un certain attachement à ses vêtements avec qui il avait vu des tonnes de choses, expérimentés un bon nombre de trucs également.

Finalement, après avoir atteint le sommet d'une petit colline, il atteignit le verger de luminis. C'était la première fois qu'il voyait cet endroit. Il fût immédiatement frappé par la présence de nombreux arbres avec de grosses boules colorées qui..non c'est pas vrai! Des fruits! Il n'y a pas que ses yeux qui lui firent remarquer mais son ventre aussi. Il n'avait pas mangé depuis un bon moment et même si la drogue avait pour caractéristique de coupé sa faim, celle-ci était si intense qu'elle trouva le moyen de se faire sentir. Les yeux illuminés comme un enfant de quatre ans qui trouve un trésor caché, il courut vers le premier arbre dans son chemin, sauta et agrippa une grosse pomme bien juteuse. Tombant sur le dos, il rit un bon coup avant de croquer dans le fruit à pleine dents. La chair sucrée du fruit et le jus qui coulait sur le bord de sa bouche étaient excellents. Un autre moment de jubilation et de complaisance dans une action pourtant anodine.

Si ce simple petit fruit a su lui faire éprouver une telle sensation, imaginez-en une tonne! C'est alors que la folie des grandeur s'empara de lui. Le pas un brin chancelant, il écrasa son joint sur le sol et entama l'ascension de l'arbre. Il s'assied sur une branche plus ou moins fragile et commença à arracher les fruits de l'arbre et de les laisser tomber sur son sac afin de ne pas trop les abîmer. Une fois qu'il eut accumulé une bonne quantité de ces fruits juteux, il voulut retourner sur le plancher des vaches mais ses sens n'étant pas suffisamment revenus , il perdit pied et tomba, se cognant la tête sur le tronc de l'arbre.

Il frotta vivement le derrière de sa tête, serrant les dents et fermant les yeux pour tenter d'une quelconque manière d'atténuer la douleur. Lorsqu'il réouvrit les yeux, une ombre semblait se tenir devant lui. À cause du soleil, il n'arriva pas à reconnaître l'individu en question mais se risqua tout de même à l'aborder, selon les vieilles traditions.

-Euh...bonjour!

Voyageant couchée sur la paille qu'un paysan venait de cultiver, Chocolat voulait voir comment était Lucina, ce monde lumineux. Elle remarqua qu'il y avait beaucoup de chaleur, le soleil brillait. Elle se demandait même s'il y aurait de la pluie. Elle aimait cela. Mais l'heure n'était pas le temps de penser à cela. L'adolescente descendit de la charrette et continua sa marche, étant sûre de sa direction. Malgré cela, elle ressentait de l'ennui, ne trouvant pas un bon endroit où rester mais elle ne perdait pas espoir. Jusqu'à qu'elle trouva un endroit assez... magnifique. Voire un peu trop parfait. Ces chants, ce paysage... Tout semblait trop joyeux pour elle. Mais bon, c'était sympa à voir.

Elle s'approcha vers un oranger... Belle contradiction, il y avait un mandarinier juste à côté, les mandarines étaient mûres pendant l'hiver. Mais elle n'hésitait pas à en goûter. Après avoir enlevé la peau, elle dégusta ce fruit... Qui était délicieux. Drôle d'endroit, pensait-elle. Après avoir fini cette clémentine, elle prit seulement une orange qu'elle mangera plus tard. Chocolat partit peu après explorer ce verger. Y'avait de tout mais... Ce n'était pas vraiment ce genre de coin que la fillette voudrait rester.

En marchant, l'Harmonienne trouva un homme qui semblait vivre dans la pauvreté, voire n'avait aucun endroit où se réfugier. Curieux de savoir à quoi ressemblait cet homme de figure, elle s'approcha plus doucement de lui. Quand il tomba, la jeune fille se dirigea vers le clochard. Devant lui, elle le regardait naïvement. Son visage visible à l'Harmonien, il dit :

"Euh... Bonjour !"

Avant de prendre une expression sournoise, Chocolat sortit son couteau et dit d'une voix très grave :

"La bourse ou la vie..."

Puis elle fit un petit rire innocent. Bien sûr que ce n'était qu'une mauvaise plaisanterie. Elle rangea cette arme et recula un peu pour montrer vraiment son visage. Ce n'était peut-être pas vraiment un homme méchant, pensait la jeune fille.

"Je suis désolé, je m'ennuyais tellement durant le voyage. Vous êtes harmonien, je me trompe ? Je vous avais vu quelques fois errer dans la rue donc..."

Elle ne voyait pas quoi dire d'autre. Mais que fais-tu petite idiote, essaie au moins de faire quelque chose, ne reste pas là comme ça. Oui, c'est ça, essaie d'aider le monsieur à se lever. Oui, tends lui ta main pour l'aider. A mon avis, il sera reconnaissant. Bien, tu l'as fait.

Seyta créa un voile d'ombre avec sa main pour voir la personne en question. Non pas qu'il espérait avoir affaire à une jolie femme plantureuse mais il fut tout de même un peu déçu de voir la fillette. Bon..fillette...elle avait quoi, quelques années de moins que lui tout au plus, mais il restait néanmoins beaucoup plus petite que lui. Comme quoi, on change beaucoup en quelques années. Bien sûr que non, il ne voulait pas qu'elle le lui ressemble, mais il aurait espéré un peu plus de volume...au moins. Il la dévisagea du mieux qu'il pu. Déjà qu'il était étourdi par sa récente chute et qu'il avait l'impression de voir son visage se tordre dans tous les sens ne l'aida pas vraiment à lui donner une quelconque apparence. Il ferma les yeux un instant puis se secoua la tête vivement, le temps qu'il ne reprenne ses esprits.

Au moins, elle avait un joli visage. Des traits qu'il jugea fin et un petit air naïf qu'il trouva plutôt charmant. Par contre, malgré ce portrait physique de fortune, il ne pouvait savoir à quoi ressemblait cette femme -jeune femme, plutôt- sans avoir, au préalable, dressé un portrait psychologique de la personne. Était-elle folle à liée? Bien sûr, ça semblait être à la mode de ces temps-ci. à moins qu'elle ne soit qu'une gentille jeune fille en manque d'attention. Cette dernière pensée lui plu, pensant avoir trouvé là, une personne qui l'accompagnerait pour quelques heures, au moins. Alors qu'il attendait la réponse de cette dernière, il fut plus que surpris de voir sa réaction.

Un couteau? Et pas un tout petit en plus. Elle le tenait comme ça devant lui comme si de rien n'était. Seyta passa rapidement une main à son visage, se demandant dans quel pétrin il venait encore de tomber. Il ravala sa salive et c'est à ce moment qu'elle ouvrit la bouche.

"La bourse ou la vie..."

Ces mots coulèrent de sa bouche comme du magma qui vinrent lentement lécher la peau de l'harmonien. Ses poils se raidirent sur ses bras, ses sens à l'affût, il avait envie de s'en aller. Il n'avait pas le choix, il devait lui donner tout son argent. Il fouilla dans son sac et sortit un autre sac, plus petit, mais rempli de pièces d'or. Il regarda l'harmonienne et arqua un sourcil quant à sa nouvelle réaction. Elle arborait à présent un sourire...Elle venait de se foutre de lui...Il se sentait un peu honteux. Il ria un peu quand même, pour ne pas déplaire à la jeune fille. Ensuite, il bouda un peu, un brin mécontent de la situation.

Lentement, il se leva grâce à la jeune fille, remit son sac d'argent ,qui faisait cet agréable bruit, dans son autre sac, puis fit le tour de l'arbre. La rencontre commençait réellement d'un mauvais pied! Encore une fois, ce fût la jeune fille qui brisa le silence!

"Je suis désolé, je m'ennuyais tellement durant le voyage. Vous êtes harmonien, je me trompe ? Je vous avais vu quelques fois errer dans la rue donc..."

Seyta en resta surpris. Au moins elle, était désolée. Deuxièmement, elle devina immédiatement qu'il était harmonien, avec comme raison qu'elle lavait vu errer dans la rue. Bah...Enfin, il ouvrit la bouche à nouveau, le sourire ayant regagné le terrain sur son visage.

-Vous auriez dû me le dire avant! J'ai vraiment eu peur, vous savez! Il ria un peu puis reprit. C'est pas grave, je ne vous en veut pas! Cela dit...je dois dire que je suis un peu fâché contre vous. Vous m'avez vu marcher dans la rue et vous ne m'avez MÊME PAS salué? Ah là là... les jeunes de nos jours.

Il se racla la gorge et continua de parler.

-Errer? Vous n'y allez pas un peu fort? Vous saurez que nous allons toujours quelque part! Pour moi, ce quelque part est toujours une surprise, c'est tout! C'est bien plus excitant comme ça, non?

Il regarda autour de lui puis vit son petit amas de pommes sur le sol. Rapidement, il en prit une sur le dessus et en présenta une à la jeune fille.

-T'en veux une? Elles sont super bonnes, j'te dis!

Sur ce, il commença à escalader l'arbre. Dès qu'il fut sur une branche pas trop haute mais relativement solide, il présenta sa main à la petite.

-Viens avec moi, la vie est bien plus belle par en-haut! Au fait, mon nom c'est Seyta!